African woman cooking on a traditional three-stone fire with smoke rising, representing energy poverty and the need for clean cooking solutions in rural Africa.
En Afrique rurale, une femme cuisine sur un feu de trois pierres qui dégage une épaisse fumée, illustrant les réalités quotidiennes de la précarité énergétique auxquelles sont confrontées des millions de femmes à travers le continent.

Qui porte le fardeau ? Genre et transition énergétique en Afrique

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Grace, mère de quatre enfants vivant dans une région rurale de Zambie, se lève avant l'aube pour parcourir des kilomètres à la recherche de bois de chauffage. Elle porte de lourds fagots sur sa tête et prépare ses repas au-dessus d'un feu de trois pierres fumant. La journée de Grace est un récit que racontent des millions de femmes à travers l'Afrique, une journée où la précarité énergétique est inscrite dans le corps féminin.

C'est la dure réalité de genre et transition énergétique en Afrique. Alors que le monde réclame du cobalt, du lithium et du graphite du sol africain pour alimenter les véhicules électriques et les batteries solaires, les femmes, qui portent les plus lourdes charges énergétiques, sont souvent laissées de côté. Le paradoxe est cruel : les minéraux africains alimentent les villes européennes et les usines asiatiques, alors qu’en Afrique subsaharienne, plus de 600 millions de personnes sont privées d’électricité et près de quatre ménages sur cinq dépendent encore de la biomasse pour cuisiner (AIE, 2023). La majorité des personnes concernées sont des femmes.

Les coûts sexospécifiques de la pauvreté énergétique

La précarité énergétique en Afrique n'est pas neutre du point de vue du genre. Elle est profondément préjudiciable aux femmes et aux filles.

  • Pauvreté temporelleLes femmes et les filles consacrent environ 18 heures par semaine à la collecte de bois de chauffage et d'eau (Banque mondiale, 2022). Ce temps pourrait être investi dans l'éducation, la création de revenus ou la participation citoyenne.
  • fardeaux de santéLa pollution de l'air intérieur due aux poêles à biomasse équivaut à fumer deux paquets de cigarettes par jour. Elle est responsable de 815 000 décès prématurés par an en Afrique subsaharienne, principalement chez les femmes et les enfants (AIE, 2023).
  • Exclusion économique:Étant donné que les femmes assument des tâches de soins non rémunérées, leur participation à la main-d’œuvre formelle du secteur énergétique reste marginale, même si les transitions énergétiques mondiales génèrent des millions d’emplois verts.

Un rapport récent sur la crise de la pauvreté énergétique en Afrique australe Il met en lumière comment les délestages, les tarifs élevés et la faiblesse des infrastructures de réseau aggravent les inégalités entre les sexes. Pour les femmes, la transition énergétique ne peut être suffisamment rapide, mais elle doit être accompagnée de justice.

Les femmes, innovatrices et non seulement victimes

Malgré les difficultés, les femmes de toute l’Afrique préparent l’avenir de l’énergie propre.

  • La Kenyane Norah Magero a développé VacciBox, un réfrigérateur portable à énergie solaire pour les vaccins, contribuant à sauver des vies dans les communautés éloignées.
  • En Tanzanie, les coopératives dirigées par des femmes qui gèrent des mini-réseaux solaires ont quadruplé les revenus des ménages, augmenté la fréquentation scolaire et renforcé le pouvoir de décision des femmes dans les conseils communautaires (Arxiv, 2024).
  • Sur l'ensemble du continent, 38% de la main-d'œuvre du secteur solaire photovoltaïque en Afrique sont des femmes, soit un chiffre supérieur à la moyenne mondiale, selon l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (Revue IRENA des énergies renouvelables et de l'emploi 2023).

Ces exemples ne sont pas des anecdotes ; ils prouvent que lorsque les femmes disposent d'outils, de financements et de formations, elles transforment les transitions en transformations. Pourtant, des obstacles systémiques persistent. Les entreprises dirigées par des femmes reçoivent moins de 51 TP3T d'investissements dans les énergies propres en Afrique (BAD, 2023). Le financement sensible au genre reste une préoccupation secondaire plutôt qu'une norme.

Les lacunes politiques qui freinent l'avancement des femmes

C’est là que réside la vérité dérangeante : la plupart des stratégies nationales de transition énergétique négligent la question du genre.

  • Le plan de transition énergétique du Nigéria met l’accent sur les financements et les technologies, mais néglige l’accès des femmes à une cuisine propre.
  • Le Partenariat pour une transition énergétique juste de l’Afrique du Sud a mobilisé plus de 14 milliards de livres sterling (TP4T8,5 milliards), mais peu de fonds sont destinés aux femmes ou aux communautés locales.
  • Dans la SADC, les gouvernements vantent la valeur ajoutée des minéraux critiques comme la voie vers l’industrialisation, mais évoquent rarement les femmes minières, transformatrices et commerçantes informelles qui risquent d’être exclues des nouveaux pôles miniers.

Sans audits de genre, allocations budgétaires et garanties juridiques, ces stratégies risquent de reproduire des économies extractives dominées par les hommes sous un déguisement plus vert.

C'est là que la collaboration régionale devient cruciale. Les pays ne peuvent gérer seuls les chaînes de valeur du cobalt, du lithium et du nickel. Une politique industrielle régionale est nécessaire, qui mutualise les ressources et veille à ce que les femmes ne soient pas marginalisées dans les échanges commerciaux et les pôles industriels transfrontaliers. Voir coopération régionale pour le commerce et la transformation des minéraux en Afrique pour une analyse plus approfondie.

Du fardeau à l'opportunité : ce qui doit changer

Pour transformer le genre et la transition énergétique en Afrique, plusieurs étapes sont urgentes :

  1. Intégration de la dimension de genre dans les plans énergétiques:Des audits de genre et des indicateurs clairs doivent être intégrés dans les cadres de transition nationaux et régionaux.
  2. Femmes entrepreneures en finance:Les donateurs et les banques africaines devraient réserver au moins 30% de fonds pour l’énergie propre aux entreprises dirigées par des femmes.
  3. Compétences et éducation:Les programmes verts dans les universités et les instituts professionnels devraient donner la priorité à la formation des femmes aux postes d’ingénieur, d’installateur et de gestionnaire.
  4. Mobilisation de la société civileLes organisations doivent amplifier les histoires des femmes, surveiller les écarts entre les sexes et faire pression sur les gouvernements pour qu’ils mettent en place des budgets tenant compte des questions de genre.

Il ne s’agit pas d’options supplémentaires ; ce sont les piliers d’une transition juste.

Conclusion : Donner du pouvoir aux femmes, donner du pouvoir à l'Afrique

Les minéraux africains illuminent le monde, mais les femmes africaines cuisinent encore au feu de bois. Cette contradiction est intolérable.

Le prochain Sommet africain sur le climat de 2025 est un test de leadership. Les dirigeants doivent aller au-delà des déclarations et adopter des engagements contraignants en faveur de l'industrialisation régionale et d'une création de valeur intégrant la dimension de genre. Pour les millions de femmes qui portent quotidiennement le fardeau de la précarité énergétique, cette occasion ne doit pas être gâchée.

La société civile ne peut se permettre le silence. Des groupes communautaires aux coalitions continentales, le message doit être clair : la valeur ajoutée des minéraux critiques dans la SADC est vaine si les femmes restent dans l’ignorance.

L'avenir du genre et de la transition énergétique en Afrique ne se mesurera pas seulement en mégawatts et en ressources minérales, mais aussi en termes d'amélioration de la vie des femmes, de reconnaissance de leur travail et d'influence de leur voix sur les politiques. Car, au final, autonomiser les femmes, c'est alimenter l'Afrique en énergie.

Pour en savoir plus sur les dimensions plus larges de la justice, voir ce que signifie une transition énergétique juste pour l'Afrique.

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Responsable de la région Afrique à  |  + de messages

Vincent Egoro est une voix africaine de premier plan en matière de transition énergétique juste, d'élimination progressive des combustibles fossiles et de gouvernance des minéraux critiques. Fort de plus de dix ans d'expérience en plaidoyer régional, il œuvre à l'intersection de la transparence, de la responsabilité et de la durabilité, promouvant des solutions communautaires qui placent l'Afrique au cœur de l'action climatique mondiale.

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