Au cœur de l'Afrique, un paradoxe se dessine. Un continent si riche en ressources renouvelables, du soleil à l'éolien, du lithium au cobalt, suffoque simultanément sous le poids d'obligations financières qu'il n'a pas choisies, mais qu'il doit désormais assumer. Au cœur de cette tension se trouve le financement climatique, outil censé soutenir les transitions énergétiques, mais qui, pour de nombreux pays africains, apparaît de plus en plus comme un frein supplémentaire.
Les chiffres racontent une histoire saisissante
Selon le Rapport 2024 de l'Initiative pour les politiques climatiques sur le paysage du financement climatique en AfriqueL'Afrique a reçu environ 143,7 milliards de livres sterling (TP4T) de financements climatiques entre 2021 et 2022. Bien que ce chiffre représente une augmentation de 471 milliards de livres sterling (TP3T) par rapport à 2019/2020, il reste bien en deçà des besoins. La Banque africaine de développement (BAD) estime que le continent a besoin de jusqu'à 14174 milliards de livres sterling (TP4T) par an pour respecter ses contributions déterminées au niveau national (CDN) au titre de l'Accord de Paris.
Mais le diable est dans les détails. Plus de 51% Une partie de ce financement est basée sur l'endettement, répartie entre des prêts concessionnels (34%) et des prêts au taux du marché (17%). Pour les pays déjà aux prises avec un surendettement, cela les rapproche de l'effondrement budgétaire.
Quand la dette éclipse le développement
Dans une étude de juin 2024, le Institut pour la justice économique Les pays africains ont averti que d'ici 2030, les pays africains consacreront 137,41 milliards de dollars de leurs besoins annuels de financement climatique au seul service de la dette publique. Cela signifie que les mêmes budgets destinés à soutenir les infrastructures d'énergie propre, l'éducation ou les systèmes de santé sont vidés de leur substance pour rembourser les prêteurs internationaux, dont beaucoup proviennent de pays ayant les plus fortes empreintes carbone.
La situation devient encore plus fragile lorsqu'elle est aggravée par l'inflation, la dévaluation monétaire et la hausse des taux d'intérêt. Moody's, seuls quelques pays africains comme le Bénin et la Côte d'Ivoire ont pris des mesures pour se protéger en développant leurs marchés de dette locaux. Les autres restent très exposés.
Une promesse non tenue ? Le JETP sud-africain vacille
Le Partenariat pour une transition énergétique juste (JETP) avec l'Afrique du Sud était censé être un exemple phare. Lancé lors de la COP26, il promettait un financement de 14,4 milliards de livres sterling (1,4 milliard de livres sterling) pour aider l'Afrique du Sud à se libérer de sa dépendance au charbon. Mais en 2025, ce partenariat s'effrite.
Le récent retrait des États-Unis L'engagement de 1,4 milliard de livres sterling (1,56 milliard de livres sterling) a ébranlé la confiance dans l'accord et révélé la fragilité des engagements multilatéraux en matière de transition énergétique. Même si l'UE, le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France se sont engagés à poursuivre leurs efforts, les observateurs de la société civile estiment que le mal est fait.
Selon un déclaration conjointe du Groupe des partenaires internationauxPlus de 142,5 milliards de livres sterling ont déjà été déboursés. Mais la majorité est encore structurée sous forme de prêts, dont beaucoup sont assortis de conditions qui, selon les critiques, pourraient compromettre la souveraineté et l'équité sociale.
Qui reçoit quoi ? Disparités dans la répartition des financements climatiques
Un autre problème flagrant est la répartition inégale des financements climatiques. Les dix premiers pays bénéficiaires ont reçu 461 TP3T du total des flux, tandis que les dix pays les plus vulnérables au climat n'en ont obtenu que 11.%, selon la Climate Policy Initiative.
Ce décalage entre vulnérabilité et accès soulève des questions cruciales. Des pays comme le Tchad, la République démocratique du Congo et le Niger, parmi les plus pauvres et les plus exposés au changement climatique, peinent à attirer les financements dont ils ont besoin. Parallèlement, des pays plus stables politiquement ou riches en ressources naturelles reçoivent des parts plus importantes, même lorsque leurs profils d'émissions ou leurs risques climatiques sont plus faibles.
Cela met en évidence un défaut plus important du système financier mondial : il récompense les personnes bancables, et non les personnes vulnérables.
Quel rôle pour la société civile ?
Dans ce contexte, la société civile africaine doit s'ériger en gardienne et en conscience. Des organisations à travers le continent agissent déjà :
- Exiger des échanges de dettes contre des investissements climatiques
- Appel à un passage des prêts aux subventions et aux instruments non liés à la dette
- Suivre la façon dont les fonds sont dépensés et garantir la transparence des partenariats
- Amplifier les voix des communautés souvent ignorées lors des sommets internationaux
Comme l'a soutenu le Institut sud-africain des affaires internationales (SAIIA)Le G20 ne peut plus se permettre de parler vaguement de « soutien » tout en évitant toute action décisive. La société civile du continent a désormais besoin de siéger à la table des négociations, et pas seulement d'un statut d'observateur.
Un système mondial qui doit être réformé
Le Groupe africain de négociateurs sur les changements climatiques (AGN) a clairement exprimé sa position. Lors des réunions de la COP, ils ont constamment plaidé en faveur de la création d'un Fonds pour les pertes et préjudices et de la réforme d'institutions comme la Banque mondiale et le FMI afin de mieux refléter les réalités des pays du Sud.
Tant que le financement climatique restera fragmenté, conditionnel et lourd en termes de dette, la transition juste restera un slogan et non une solution.
L’Afrique peut-elle prendre la tête de la charge en matière d’énergie verte ?
Malgré ces défis, l’espoir demeure.
L'Afrique possède tout ce dont le monde a besoin : soleil, vent, jeunesse et minéraux essentiels. Mais pour passer du potentiel à la puissance, le continent a besoin d'un écosystème financier qui travaille pour lui, et non contre lui. Financements mixtes, allègement de la dette, assurance contre les risques climatiques et modèles d'adaptation communautaires sont tous testés.
Et avec une volonté mondiale adéquate, la voie de l’Afrique vers un avenir énergétique propre pourrait donner le ton au reste du monde.
Réflexions finales
La crise du financement climatique en Afrique n'est pas seulement une question de chiffres. C'est une question de justice, d'équité et de survie. Si le monde croit vraiment à l'action climatique, alors soutenir la transition énergétique de l'Afrique n'est pas un acte de charité, c'est une responsabilité partagée.
Le temps des paroles est révolu. Ce dont l'Afrique a besoin, c'est d'argent sur la table, de confiance dans le processus et de se libérer d'une dette devenue obsolète.
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